Le point sur ma situation

Salut à tous ! Je vous écris ces quelques lignes pour vous parler rapidement de ma vie ici à Saïgon. Ça fait plus d'un mois que je suis ici, et j'ai pas donné énormément de nouvelles jusqu'à maintenant. Il est temps de remédier à tout ça !

Le boulot

Alors pour commencer, je me suis trouvé un boulot pour faire rentrer un peu d'argent. Du jour au lendemain, je suis devenu professeur d'anglais ! Mais comment est-ce possible ?

Comme je vous l'avais dit dans un précédent article, ici prof d'anglais c'est le boulot facile pour les occidentaux de tout poil. Je vous résume la situation en deux mots: l'état vietnamien a décrété que d'ici 2020, tous les élèves qui quittent l'école doivent parler anglais. Pour y parvenir, il y a donc maintenant des cours d'anglais à tous les niveaux, et ça commence dès le primaire. Problème, ça fait une grosse demande de profs d'anglais du jour au lendemain, et il n'y en a pas assez ! Solution, tous les gens qui parlent anglais deviennent du coup des profs d'anglais potentiels. Et d'autant plus si on est un occidental, on a la tête de l'emploi.

Alors voilà, la demande est forte, il y a de nouvelles offres d'emploi tous les jours sur le net, il y a juste à postuler, rien de plus simple. Quasiment toutes les annonces demandent: une personne dont l'anglais est la langue maternelle, qui a un diplôme d'enseignant, et au moins un an d'expérience. Moi, j'ai répondu en toute franchise que j'étais français, que je n'avais ni diplôme ni expérience, mais que je parlais anglais et que j'avais déjà vécu dans un pays anglophone. J'avais quand même un argument pour moi ;) Et ça a suffit ! J'ai passé un entretien (vraiment minable en plus), et j'ai été embauché. C'est vous dire si la demande est forte.

Je bosse donc maintenant pour un centre de langues, connu sous la douce appellation d'I-CLC. Ce sont eux qui recrutent des profs d'anglais, et qui ensuite les envoient dans des écoles, publiques, privées ou que sais-je. Ils servent en gros d'intermédiaire entre les écoles et les professeurs. Et ils sont vraiment essentiels, car le petit monde des profs d'anglais est vraiment des plus hétéroclites. On trouve de tout là-dedans. On a le vrai prof, diplômé et vacciné, dont c'est le métier depuis des années. Probablement assez rare dans les écoles publiques, on le trouvera plus sûrement dans des écoles privées réputées ou des écoles internationales. Plus facile à rencontrer, le mec qui passait par là à un moment, qui s'est improvisé prof d'anglais par la force des choses, et qui est resté. Certains sont là depuis plusieurs années maintenant. On trouve aussi le backpacker, c'est à dire le type qui baroude, qui s'arrête bosser quelques semaines ou quelques mois à Saïgon histoire de se refaire, et qui reprend la route par la suite.

Du coup, le centre de langues se retrouve à devoir gérer tout ces profs complètement différents. Certains profs prennent le boulot sérieusement, d'autres vont disparaître du jour au lendemain sans même passer un coup de fil. Certains vont rater une journée pour récupérer de la soirée de la veille. D'autres appeler le dimanche soir pour dire qu'ils ne seront pas là de la semaine. C'est un peu sans foi ni loi quoi. Certains profs peuvent aussi travailler pour différents centres de langues, histoire de bosser un peu plus, mais du coup leurs dispos sont jamais les mêmes.

Pour compliquer encore un peu la situation, il semblerait, de ce qu'on m'a dit et de ce que j'ai constaté, que l'organisation et la planification ne soit pas non plus le point fort des Vietnamiens. Ils gèrent un peu tout à la dernière minute, ce qui ajoute encore au bordel général :)

Voilà qui vous situe un peu le contexte ! Depuis presque un mois maintenant, je fais donc des remplacements dans des écoles primaires. Les petits gars d'I-CLC m'appellent la veille pour le lendemain, ou même au jour le jour, et m'envoient bosser pour une demi-journée ou une journée dans une école. Très souvent dans le district 7 où j’habite. Si je suis dispo, j'y vais, sinon je leur dis non, et ils appellent d'autres profs jusqu'à ce qu'ils aient quelqu'un. C'est aussi simple que ça.

Primary school in D7
Une école primaire typique flambant neuve. Elles sont souvent décorées comme ça les écoles, on les voit de loin. Bon là c'est le week-end, y'a personne.

Pour ce qui est de donner le cours, l'improvisation est la seule règle qui vaille. Je débarque à l'école, j'entre en classe, je demande quelle est la leçon du jour, et c'est parti. D'une façon ou d'une autre, il faut se débrouiller pour capter l'attention de 40 marmots pendant 35 minutes, et essayer de leur inculquer des rudiments d'anglais tout en les amusant. Ça parait un peu sport comme ça, et ça l'est. Le premier cours, on a un peu l'impression de se faire envoyer au casse-pipe, pas de briefing, aucune préparation, on connaît même pas le sujet de la leçon, que dalle. Mais ça passe. La demi-heure de cours file très vite, les petits Vietnamiens sont adorables, l'ambiance est super, et on ne regrette pas.

Et finalement on s'y fait assez vite, à cette façon de faire au jour le jour, ça devient naturel et on se prend pas trop la tête. On s'adapte quoi, de toute façon vaut mieux s'adapter, y'a pas le choix. Ils m'appellent quand ils ont besoin, j'y vais si j'ai envie. Les horaires de cours sont juste parfaits, tôt le matin et début d'après-midi. J'ai mes week-ends de libre, et ça me permet de gagner juste ce qu'il faut d'argent pour payer le loyer. Exactement ce dont j'avais besoin !

Le transport

Avec le boulot, il m'a fallu un moyen de transport. Alors je me suis mis au scooter, comme tout le monde. J'aurai quand même résisté près d'un mois à la tentation, ce qui m'aura permis de goûter aux joies des transports en communs, de la marche à pied et du taxi-scooter.

Mais tout ça, c'est fini, et je suis maintenant l'heureux possesseur d'un Honda Wave RS de 2006, semi-automatique, que j'ai acquis pour la modique somme de 250 dollars. Après quelques petites réparations, inhérentes à tout véhicule acheté d'occasion, la bête se comporte plutôt bien, légère et maniable, un plaisir à conduire.

Honda Wave RS
Voilà la bête !

La conduite ici est assez différente de celle qu'on connaît en France, comme vous pouvez l'imaginer. Pour résumer en deux mots, je dirai que, dans l'ensemble, on roule à droite. Sauf quand il est plus pratique de rouler à gauche. Les feux rouges sont respectés, sauf lorsqu'il est manifeste qu'on peut passer sans que ça dérange. Les plus gros véhicules ont la priorité, les plus petits se poussent. Pour tourner, il n'y a pas vraiment de règle, on fait en fonction de la situation: parfois on coupe le virage, parfois non. La seule règle qui est universellement respectée: le port du casque. Sinon, c'est l'amende, et les policiers ne manqueront pas une occasion de se faire un petit complément de salaire.

Ça peut paraître un peu bordélique dit comme ça, mais dans les faits ça marche plutôt bien. Il y a une logique dans la façon dont tout ce petit monde se comporte sur la route, qui fait qu'on acquiert rapidement les bons réflexes. On comprend comment ça marche sans avoir besoin de se faire expliquer, c'est assez intuitif. De plus, dans l'ensemble les gens roulent tranquilles. Ils pourraient rouler beaucoup plus vite, mais ils ne sont pas du genre à faire la course sur la route. Ils sont plutôt en mode ballade. Comme j'ai lu quelque part, faire du scooter ici, c'est un peu comme marcher vite, rien de plus.

Des langues tous azimuts

Enfin, et pour en finir avec cet article qui est décidément bien plus long que je ne l'avais prévu, sachez que je rencontre aussi quelques personnes, que la solitude du début s'estompe, et que j'ai des chouettes activités par-ci par-là.

Je fais donc partie d'un groupe de conversation vietnamien, qui se réunit tous les dimanches en fin d'après-midi dans un café. On est entre 15 et 20 personnes, moitié Viets moitié étrangers (français surtout, japonais, canadiens, etc...). Certains sont totalement débutants comme moi, alors que d'autres savent déjà parler et viennent pour s'améliorer. Le club est géré d'une main de maître par la petite Quỳnh Giao, qui s'assure à chaque fois qu'il y ait autant de Vietnamiens que d’étrangers, de façon à pourvoir faire des duos. Au final, c'est un cours particulier, donné par des amateurs. C'est gratuit, tout le monde est là de son plein gré, et ça se passe super bien. Après on va manger ensemble ou boire un coup, on rigole, c'est tranquille. Pour le moment je suis pas mal à fond sur la langue, j'apprends des mots nouveaux tous les jours. Ça c'est facile tant que c'est lu et écrit, mais parler et comprendre c'est une autre paire de manche.

Vietnamese Speaking Club
Première soirée avec le "Vietnamese Speaking Club", le 27 Décembre 2015. Une fois par mois, ils fêtent les anniversaires de toutes les personnes qui sont du mois en question, d'où le gâteau.

Dans un souci d'équilibre, je fais aussi parti d'un groupe de conversation française depuis ce week-end, qui regroupe donc Français et Vietnamiens qui veulent améliorer leur français. Très sympa aussi, ça s'annonce bien. Le club a été monté par des Vietnamiens qui parlent bien français et voulaient continuer à pratiquer pour ne pas oublier. J'ai notamment appris que le terme "bobo" signifie bourgeois-bohême, comme quoi, on est jamais à l'abri d'apprendre un truc essentiel (que tout le monde savait déjà apparemment).

À mes heures libres, je passe aussi pas mal de temps à avancer sur l'écriture d'un petit programme pour PC. C'est un logiciel tout simple qui permet d'écouter des radios internet, et qui va tourner initialement sur Linux. C'est un projet que j'ai de longue date, mais ça fait finalement pas si longtemps que j'ai le temps nécessaire pour m'y mettre. Donc, quelque part je suis toujours dans les langages, mais cette fois il s'agit de langage informatique. C'est pas très différent d'une langue vivante, il s'agit d'exprimer sa pensée avec des mots, en respectant une grammaire, et d'être compris.

Si vous ajoutez l'anglais à tout ça, vous comprendrez qu'en ce moment les langues occupent une place importante dans ma vie :)

Je fais aussi un peu de sport pour équilibrer un peu avec toute cette activité cérébrale. Je fais toujours du jogging, j'essaie de courir deux fois par semaine. Le meilleur moment, c'est tôt le matin au lever du soleil, c'est là qu'il fait frais, et la ville se réveille juste, c'est encore assez calme. Donc le plus gros challenge, c'est d'arriver à se lever à 5h le matin, mais je m'en sors assez bien jusqu'à maintenant.

Je vais aussi nager de temps en temps, je connais une piscine pas trop mal pas loin de chez moi, mais je vais tacher d'en débusquer d'autres histoire de varier mes lieux de natations. Je dis débusquer, car parfois, les piscines il faut connaître. On les trouve au milieu de grands immeubles tous neufs, on les repère avec les photos satellites de Google Maps. Le problème c'est qu'on ne sait jamais si elles sont privées ou publiques, il faut y aller pour savoir, trouver où garer le scooter, chercher l'entrée, l’ascenseur (car ce genre de piscine sont souvent à quelques étages de hauteur), etc... Bref, c'est toujours un peu la galère, du coup j'ai tendance à avoir la flemme et me tenir à ce que je connais. Ce qui n'est pas une bonne chose, donc je dois régulièrement me mettre des coups de pied au cul pour ne pas tomber dans l'immobilisme :)

Văn Thánh swimming-pool
La piscine de Văn Thánh, pas le top pour nager, mais parfait pour se détendre. En plus, en semaine il n'y a vraiment pas grand monde.

Voilà voilà, dans tout ça je m'ennuie pas du tout, et imaginez vous qu'en un mois et demi j'ai toujours pas eu le temps de mettre le nez en dehors de la ville. J'espère bien avoir une occasion un de ces 4, et alors je pourrai peut-être enfin vous mettre autre choses que des photos urbaines sur le blog :)